Sieranevada vu par Fanny
A travers une très belle amitié avec Mariuca, tout ce qui concerne la Roumanie m’intéresse.
C’est ainsi que le dernier film de Cristi Puiu : Sieranevada, sĂ©lectionnĂ© au festival de Cannes, illustre quelques traditions Ă l’occasion de la commĂ©moration de dĂ©funts.
Quarante jours après la mort du père de famille, les proches se réunissent dans un appartement de Bucarest, et nous assistons à une succession de conflits et de règlements de comptes.
L’homme est toujours au plus près de la vĂ©ritĂ© lorsque la mort apparaĂ®t, l’essentiel est dit dans ces moments particuliers, car les non-dits jalonnent souvent toute une vie,
Et, paradoxalement, cette vĂ©ritĂ©Â : c’est le mensonge ! EmployĂ© toute sa vie durant, tant au niveau du dĂ©funt, du fils, du beau frère, etc… Ah ! Les mĂ©andres de l’âme humaine !!
Pourquoi ce rite se dĂ©roule-t-il 40 jours après le dĂ©cès ? Jusqu’alors l’âme du mort reste dans les parages, pour ne pas se sĂ©parer trop brutalement des siens, et aujourd’hui, il est temps pour lui de partir vivre son Ă©ternitĂ©.
Pendant pas moins de 3 heures,nous assistons Ă un huis-clos familial, oĂą l’attente du Pope donne lieu Ă une agitation très rythmĂ©e par l’ouverture-fermeture des portes, la mise en place incessante des couverts .
L’univers politique est omniprĂ©sent, dans les propos des anti et pro-communistes, cette longue pĂ©riode communiste laisse une empreinte tellement importante sur plusieurs gĂ©nĂ©rations…
Il en rĂ©sulte quelques dĂ©bats houleux, D’autres dĂ©veloppent,selon l’un des fils des thĂ©ories mensongères, sur internet, Ă propos des puissances Ă©trangères.
L’homosexualitĂ© est aussi abordĂ©e, avec la nièce de Lary, qui amène son amie ivre morte, au risque de choquer quelques membres de la famille.
Quelques scènes d’hystĂ©rie aussi, oĂą des inconnus, après des mots violents et très abrupts, en viennent aux mains pour une voiture mal garĂ©e !! Triste rappel du quotidien !
Mimi Branescu, dans le rĂ´le de Lary, personnage assez central, dit sa part de vĂ©ritĂ©, Ă travers son passĂ©, ses peurs…
On perçoit que le matriarcat dans cette sociĂ©tĂ© roumaine est prĂ©pondĂ©rant, bien que la femme peut ĂŞtre bien malmenĂ©e. Par exemple, lorsque le beau-frère, mari volage plongĂ© dans l’alcoolisme, rĂ©alise seulement Ă l’annonce d’une maladie, le bouleversement que cela reprĂ©senterait.
Suivant la tradition orthodoxe, nous assistons aux sacrements du pope dans la salle à manger familiale et au partage de plats préparés à cette occasion, et distribués au voisinage.
Selon la coutume, l’un des fils revĂŞt le costume du dĂ©funt, pas du tout Ă sa taille, et le dĂ®ner, toujours repoussĂ©, peut enfin avoir lieu.
Malgré les circonstances, et un certain état de tension, tout finit par un éclat de rire !
Beaucoup d’humour tout au long du film !
Sieranevada vu par Marion
Courant Août, j’ai l’heureuse surprise de recevoir deux invitations de Jean-marc (adopté du Pérou) pour visionner le film Sieranevada du Producteur Cristi Puiu. Très curieuse de découvrir l’univers de ce réalisateur Roumain et dont le film a été présenté en sélection officielle du festival de Cannes 2016, c’est l’occasion de partager ce moment avec une de mes amie Fanny.
Ma fréquentation des salles de cinéma a fortement baissé avec le temps, mais l’attraction pour les petites salles obscures aux sièges de velours, me donnent un pincement au cœur lorsque le film débute et l’excitation de se rendre au cinéma. Tout ceci est resté intact.
Par chance, nous trouvons rapidement une sĂ©ance dans une superbe rue un petit cinĂ©ma d’art et essai très beau Ă l’extĂ©rieur comme Ă l’intĂ©rieur et qui semble sorti d’un temps passĂ© comme je les aime. Certes le lieu est un peu exiguĂ«, on n’aura pas la 3D ou le dernier block buster amĂ©ricain. Mais ce lien est magique, le cadre avec beaucoup de bois, une cheminĂ©e, 4 petites salles avec ces fauteuils rouges confortables… une dĂ©co super et un programme toujours Ă la hauteur, des films de tout horizon, l’ambiance se prĂŞte pour une dĂ©tente totale…..eh oui nous allons vivre 2h50 en compagnie d’une famille roumaine.
Envoûtée par la magie de cet espace et par le grand écran blanc nous nous installons au fond de la salle. A ma grande surprise le cinéma roumain semble attirer beaucoup de curieux car la salle se remplie avec un public très varié.
D’entrĂ©e de jeu le rĂ©alisateur opte pour un plan fixe au coin d’une rue Ă Bucarest oĂą l’hiver semble encore prĂ©sent.  On y perçoit une famille pressĂ©e de monter en voiture et dont on n’entend que quelques bribes de conversation. Ce plan se dĂ©roule 3 jours après l’attentat contre Charlie Hebdo et quarante jours après la mort du père de Lary. Ce mĂ©decin de 40 ans va passer son samedi au sein de sa famille exclusivement entre adultes ou presque rĂ©unis Ă l’occasion de la commĂ©moration selon la tradition orthodoxe la disparition du dĂ©funt. Pourtant, l’évĂ©nement ne se dĂ©roule pas comme prĂ©vu. Un vĂ©ritable ballet d’acteurs se prĂ©sente pendant l’interminable attente du pope, censĂ© bĂ©nir les lieux, empĂŞchant la famille de se mettre Ă table, ouvrant la porte Ă des dĂ©bats vifs entre ventres vides oĂą les avis divergent. Bref c’est la vie, avec ses banalitĂ©s, sa dramaturgie, et ses absurditĂ©s.
Le démarrage m’a paru un peu long mais le réalisateur Cristi Puiu a cette capacité à mobiliser un humour sarcastique tout en mettant le spectateur en immersion totale en tant qu’observateur fantomatique. D’ailleurs, les trois heures s’écoulent sans interruption. L’accumulation de personnages et leurs allées et venues dans un tourbillon de portes (qui peut donner par moment le mal de mer) accentuent l’impression de confinement dans cet appartement.
En conclusion, ce film montre un jeu de parallélisme entre une fiction familiale et une fiction politique en évoquant la nostalgie du parti communiste chez certains personnages.
Sieranevada déroute, car il est comique, dramatique et politique.
Fanny et Marion
Sources :
Images provenant de la page facebook du film :Â https://www.facebook.com/sieranevada.lefilm/