L’adoption Ă©volue en fonction des valeurs et des besoins de nos sociĂ©tĂ©s et pas en fonction des besoins de l’enfant.

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 Une nouvelle proposition de loi visant Ă  rĂ©former l’adoption en France a fait la une de nos mĂ©dias depuis la 30 novembre 2020, le gouvernement a engagĂ© une procĂ©dure accĂ©lĂ©rĂ©e sur ce texte.

Le 4 dĂ©cembre 2020, l’AssemblĂ©e Nationale a adoptĂ© en premiĂšre lecture avec modifications la proposition de loi. Elle avait Ă©tĂ© dĂ©posĂ©e par la dĂ©putĂ©e Monique Limon et plusieurs de ses collĂšgues le 30 juin 2020. La proposition de loi a pour double objectif de faciliter et sĂ©curiser le recours Ă  l’adoption et de renforcer le statut de pupille de l’État. Elle ouvre notamment l’adoption aux couples non mariĂ©s, abaisse l’Ăąge pour adopter Ă  26 ans et la durĂ©e de vie commune des couples candidats Ă  un an. Elle clarifie les rĂšgles de prise du congĂ© d’adoption.

L’A.F.O.R souhaite vous partager ses quelques rĂ©flexions car la parole des adultes adoptĂ©s, et leurs positionnements ne semblent pas ĂȘtre sollicitĂ©s, ce qui est bien dommage.

Il nous semble nĂ©cessaire de regarder l’histoire de l’adoption dans certains pays comme la Roumanie, oĂč une vĂ©ritable fabrique de « faux orphelins » a Ă©tĂ© mise en place.

Pour Ă©viter que cela recommence et dans l’intĂ©rĂȘt supĂ©rieur de l’enfant, il est nĂ©cessaire d’en tirer des leçons et de donner la paroles aux adoptĂ©s et Ă  leurs familles.

A ces dĂ©buts, en 1950 aux USA et en 1970 dans le reste du monde, les adoptions internationa­les s’effectuaient quasiment dans un vide juridique et lĂ©gal aussi bien au niveau national qu’à l’in­ternational. En effet, sous la dictature de Ceausescu, les contrats juridiques n’avaient aucune valeur pour valider une adoption internationale, il fallait la signature officielle de Nicolae Ceausescu.

Dans les années 80, des fortes pressions politiques et des parents existent pour avoir un enfant, et beaucoup vont écrire à nos politiques Français. Paradoxalement, Elena Ceausescu en 1988-1989 a dit nom pour les adoptions internationales.

La chute du rĂ©gime fin 1989, le 6 janvier 1990, 63 enfants sont amenĂ©s dans un avion en France, l’Organisme AutorisĂ© pour l’Adoption (OAA) MĂ©decins du Monde se crĂ©ait.  Un nouveau rĂ©gime se met en place (Ion Illescu) et prend la dĂ©cision de laisser partir les enfants de Ceausescu qui devaient partir en adoption et aprĂšs ce nouveau rĂ©gime voulait tout arrĂȘter.

Mais le contraire, s’est passĂ© car les USA, le France, et autres pays, on fait croire au monde et avec une grande manipulation mĂ©diatique (rĂ©f Images d’enfants roumains et mĂ©dias occidentaux. La construction d’une cause (1989-1990)-BĂ©atrice Scutaru) que beaucoup d’enfants Ă©taient adoptables, c’est Ă  ce moment qu’une organisation se met en place entre l’humanitaire, et  les OAA.

Une loi sur l’adoption voit le jour le 11/1990 modifiĂ©e le 8 juillet 1991. « Toute demande d’adoption d’enfant roumain par un couple Ă©tranger doit obligatoirement ĂȘtre prĂ©sentĂ©e par l’intermĂ©diaire d’une Ɠuvre d’adoption agrĂ©Ă©e en France et en Roumanie ».

Des adoptions internationales sont organisĂ©es par des fondations, des agences « privĂ©es » franco-Roumaines (et autres pays) sans le moindre encadrement, sans autorisation, sans contrainte et avec des sommes d’argent astronomique. Des chasseurs d’enfants venaient Ă©galement en France pour trouver des parents qui souhaitent avoir un enfant Ă  tout prix. En quelques jours les parents se rendaient en Roumanie avec des valises pleines d’argent pour acheter leur future progĂ©niture.

Toute une organisation se met en place dĂšs 1991 et des rabatteurs d’enfants (travailleurs sociaux, avocats, notaires, mĂ©decins et autres) allaient dans les zones pauvres pour trouver des enfants. Une vĂ©ritable chasse « aux faux orphelins » est en route.

Dans les annĂ©es 90 la Roumanie a fait de l’adoption de protection de l’enfance, c’est une supercherie, puisque qu’une fois le jugement d’adoption validĂ©, l’enfant n’est nullement accompagnĂ© dans son intĂ©gration dans sa nouvelle famille.

En parallùle, l’heure du capitalisme arrive en Europe et pour faire rentrer la Roumanie dans ce systùme des fusions industrielles se mettent en place comme Renault-Dacia Pour rentrer à l’OTAN, les USA, ont fait pression aux gouvernement Roumain pour qu’ils recouvrent les adoptions à l’international. L’enfant est une marchandise.

En parallĂšle, petit Ă  petit, les Etats concernĂ©s ont dĂ©veloppĂ©, indivi­duellement et collectivement, des exigences de plus en plus strictes et dĂ©taillĂ©es par le biais de textes lĂ©gislatifs et rĂ©glementaires aux niveaux national, rĂ©gional et global.  La Convention relative aux droits de l’enfant (CDE) et la CLH93 sont des textes phares.

En 1993 la Roumanie adhĂšre Ă  la Convention EuropĂ©enne sur les adoptions internationales. Une loi vient complĂ©ter la lĂ©gislation sur l’adoption, redĂ©finissant l’abandon : « S’il y a pas de visite pour 6 mois, les droits parentaux peuvent ĂȘtre terminĂ© par la juge »

En 1994, la Roumanie ratifie la Convention sur la protection de l’Enfance et de la coopĂ©ration en matiĂšre d’adoptions internationales (La Haye).  

En 1995 : Dans la Convention de la Haye, un texte phare apparait : « Un enfant a le droit Ă  une famille et que les institutions et les familles d’accueil n’est pas une famille ». Cela veut dire, que l’Etat ne veut plus protĂ©ger l’enfant, l’Etat lui coupe tous ces droits et mesures de protection. Cela semble aller plus dans l’intĂ©rĂȘt du consommateur qui est l’adulte et les lobbings.

1997 : Monsieur Tabacaru est devenu le plus jeune secrĂ©taire d’Ă©tat, prĂ©sident de l’autoritĂ© nationale pour la protection et les adoptions d’enfants. Il a menĂ© une politique de dĂ©sinstitutionalisation. Il fait passer une nouvelle loi d’adoption avec un systĂšme de points-de bonus en 1998. Comme l’Etat roumain n’avait pas d’argent pour la protection de l’enfance, ce systĂšme Ă  points est une histoire de gros sous qui entre en jeu. Le commissaire EuropĂ©en GĂŒnter Verheugen a dĂ©clarĂ©. « Les organisations cherchant Ă  adopter et Ă  donner l’impression de le faire Ă  des fins humanitaires reçoivent des points en fonction du nombre de dons. Un marchĂ© avait Ă©tĂ© crĂ©Ă©, « j’ai moi-mĂȘme vu des catalogues dans lesquels vous pouviez choisir un enfant » Le commissaire europĂ©en au dĂ©veloppement est choquĂ© par le systĂšme de points des adoptions. Selon les normes de l’Union europĂ©enne, le commerce des adoptions d’enfants est contraire Ă  la politique de protection de l’enfance de l’UE.  Les agences d’adoption Ă©trangĂšres ont ensuite envoyĂ© de l’argent pour aider la protection de l’enfance en Roumanie: formation, fournitures, tout. Toute aide s’est transformĂ©e en points. Celui qui a obtenu le plus de points a reçu le plus d’enfants en adoption. En 10 ans 30 000 enfants sont adoptĂ©s

Monsieur Nigel Cantwell (Fondateur de DĂ©fense des Enfants–International Ă  GenĂšve en 1979, a coordonnĂ© l’apport des ONG internatio­nales Ă  l’élaboration de la Convention rel­ative aux droits de l’enfant tout au long des annĂ©es 80) a dĂ©clarĂ© rĂ©cemment dans la revue Netz spĂ©cial : « Ce qui est prĂ©occupant c’est le rĂŽle de OAA dans ces adoptions en Roumanie et dans d’autres pays (HaĂźti, Vietnam). Cet argent versĂ© par les OAA, gĂ©nĂ©ralement fourni par les adoptants, a crĂ©e un envi­ronnement systĂ©mique «propice» Ă  toutes sortes d’activitĂ©s illicites. Comme l’expliquait en 2016 le reprĂ©sentant de l’autoritĂ© centrale d’un pays d’accueil concernĂ©, sous couvert d’anonymat, on «a pu constater des pratiques problĂ©matiques (sur le plan Ă©thique) au niveau des autoritĂ©s provinciales: attribution de propositions d’enfants au prorata des initiatives (finan­ciĂšres) prises par les OAA (sous la forme de «projets d’aide humanitaire», «d’aide au dĂ©veloppement» ), financement direct par les OAA des dĂ©marches pouvant rendre un enfant adoptable (examens mĂ©dicaux) » .

Aujourd’hui, une gĂ©nĂ©ration de « faux orphelins » a entre 20 et 45 ans, et beaucoup d’entre eux ont ce besoin de s’exprimer sur leurs racines, sur leurs parcours d’adoptĂ©s, d’adoption, leur interrogation sur leurs recherches des origines, leurs quĂȘtes d’identitĂ© et de leur culture (par exemple la culture des Roms), leurs dĂ©racinements forcĂ©s, l’accĂšs Ă  leur dossier qui font partie de leur dĂ©but de vie et l’histoire du pays.

MĂȘme 30 ans aprĂšs, le dialogue semble tabou dans les familles et dans nos sociĂ©tĂ©s.

L’équipe de l AFOR depuis sa crĂ©ation en 2015, accompagne un grand nombre d’adoptĂ©s en recherche de rĂ©ponses, et de leurs familles biologiques. Depuis les annĂ©es 80, la plupart des dossiers ne sont pas cohĂ©rents avec des faux papiers, des fausses informations sur les parents biologiques (dĂ©cĂšs, disparus, aucune trace, abandon) et des dossiers mĂ©dicaux frauduleux.

En ayant un regard sur l’histoire et le dĂ©roulement des procĂ©dures d’adoptions, on peut mieux comprendre le mal ĂȘtre chez les adoptĂ©s et leurs familles par le manque d’accompagnement adaptĂ© face aux diffĂ©rentes problĂ©matiques rencontrĂ©es : diffĂ©rence culturelle, troubles d’abandon, d’attachement, et autres troubles sĂ©vĂšres dĂ» Ă  cet arrachement forcĂ©, son histoire avant son adoption qui n’a pas Ă©tĂ© pris en compte. Le racisme intra-familiale est trĂšs marquĂ© pour des adoptĂ©s d’origine Rom.

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Le rĂ©el problĂšme c’est qu’on parle trĂšs peu, voir pas du tout des difficultĂ©s des familles adoptantes car elles n’ont pas Ă©tĂ© prĂ©parĂ©es Ă  accueillir ces « faux orphelins ». La parentalitĂ© adoptive devrait ĂȘtre accompagnĂ©e aprĂšs l’adoption de l’enfant pour sa sĂ©curitĂ© et dans son intĂ©rĂȘt supĂ©rieur et jusqu’à sa majoritĂ© en fonction de ses besoins.

Beaucoup de parents adoptifs veulent ĂȘtre des parents parfaits et ils culpabilisent lorsque surviennent des problĂšmes et ils n’osent pas en parler. De plus, trĂšs peu de psychiatres, de travailleurs sociaux sont formĂ©s Ă  ces situations si particuliĂšres.

Dans l’adoption : “il ne suffit pas d’aimer” !!!

L’adoption Ă  la base Ă©tait de donner une famille Ă  un enfant orphelin c’est-Ă -dire sans famille.

On peut se rendre compte que l’adoption Ă©volue en fonction des valeurs et des besoins de la sociĂ©tĂ©, et non en fonction des besoins de l’enfant.

Comment va ĂȘtre recueillie la parole de l’enfant, son projet personnel dans une nouvelle famille, un nouveau parent.  Et si l’enfant n’a pas envie d’adopter une famille est ce que cela sera pris en compte ?

Nous le savons que le systĂšme de la protection de l’enfance coĂ»te trĂšs cher, et qu’il est dĂ©faillant. Et d’ailleurs la protection de l’enfance est traitĂ©e de façon trĂšs virulente, violente par les mĂ©dias Français. Tout n’est pas Ă  jeter dans un systĂšme. Il est plus facile de manipuler le tĂ©lĂ©spectateur en montrant le pire et tous les parents biologiques ne sont pas des monstres pour dĂ©laisser leurs enfants.

Cette mĂ©diatisation violente et mensongĂšre et nous la connaissons avec l’histoire de Roumanie depuis 1989 et elle nous a marquĂ©.

Proposer et dĂ©cider d’un placement c’est dĂ©clencher un acte violent pour l’enfant et la famille biologique, et parfois vitalement nĂ©cessaire, parfois non. Comment les Ă©quipes pluridisciplinaires sont-elles prĂ©parĂ©es Ă  faire une Ă©valuation initiale et de qualitĂ© qui conduisent au placement de l’enfant ? Quel travail est pensĂ©, rĂ©flĂ©chi pour que le lien enfant et parent biologique ne soit pas rompu dĂ©finitivement ?

Beaucoup d’enfants ont Ă©tĂ© placĂ©s abusivement, ne reproduisons pas ce qui se fait au Royaume Unie avec une politique de dĂ©sinstitualisation pour rĂ©duire les coĂ»ts de la Protection de l’Enfance.  En effet les services sociaux ont Ă©tĂ© financiĂšrement encouragĂ©s Ă  retirer leurs enfants Ă  des parents soupçonnĂ©s de maltraitance ou jugĂ©s Ă  l’avance incapables d’assumer leur rĂŽle, Ă  l’instar des mĂšres cĂ©libataires ou des couples dĂ©sargentĂ©s. Un tiers ont Ă©tĂ© retirĂ©s abusivement, pour motif qu’ils sont potentiellement dangereux pour leur progĂ©niture et non que ces parents soient violents, maltraitants ou abusifs. Ces parents sont le plus souvent des parents Ă©conomiquement fragiles, prĂ©caires, des familles monoparentales.

Ne crĂ©ons pas des faux orphelins pour rĂ©pondre aux pressions des lobbyings, aux parents trop pressĂ©s d’avoir un enfant, et pour baisser les coĂ»ts de la protection de l’enfance.

En Roumanie, une loi adoptĂ©e au 1er janvier 2019 marque un nouveau pas vers la fermeture de ces centres. Elle interdit le placement en institution des enfants avant l’Ăąge de 7 ans (contre 3 ans auparavant), en faveur d’une prise en charge par des familles d’accueil professionnelles. Les enfants seront placĂ©s en adoption aprĂšs un Ă  deux ans de placement en famille d’accueil. 8000 enfants sont adoptables d’aprĂšs les donnĂ©es de protection de l’enfance Roumaine (septembre 2020)

La demande est plus forte que l’offre, et les adoptions Ă  l’international sont en grande baisse depuis plusieurs annĂ©es.  Donc tous les moyens sont mis en place pour rĂ©pondre Ă  toutes ces pressions et qui ne rĂ©pondent pas aux besoins de l’enfant.

Adopter un enfant n’est pas qu’un acte juridique,  pour qu’il y ait une filiation on adopte pas un enfant comme un acquiert un objet. Un vĂ©ritable projet avec son accord doit ĂȘtre construit autour de lui.

Dans ce projet de texte de loi, l’intĂ©rĂȘt supĂ©ri­eur de l’enfant est mis en avant c’est-Ă -dire essentiellement le respect de tous ses droits, doit primer absolument dans le processus d’adoption.

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Le droit Ă  l’identitĂ© n’est nullement Ă©voquĂ©.

Beaucoup d’adoptĂ©s adultes sont en quĂȘte d’identitĂ©. L’adoption plĂ©niĂšre est perverse car l’identitĂ© de l’enfant change juridiquement dĂšs le jugement de l’adoption plĂ©niĂšre. Son identitĂ© premiĂšre est inexistante, tout est effacĂ© comme son histoire d’avant.

Aucune proposition de loi n’est faite pour accompagner personnellement et professionnellement ces jeunes adultes Ă  se rĂ©parer dans cette quĂȘte, Ă  travers son parcours d’adoptĂ©, et dans sa rĂ©appropriation de sa culture, de son histoire et de ces racines. Cela fait partie de son droit de connaĂźtre son identitĂ© et l’état ne propose rien. Une coopĂ©ration entre le pays d’accueil et le pays d’origine doit se mettre en place pour porter une rĂ©flexion commune et la mise en place de supports qui seront une aide indispensable pour l’adoptĂ©(e) et sa famille biologique.

 

 

L’A.F.O.R

Références :

-« International adoption of Romanian childrenand Romania’s admission to the European Union (1990-2007) » (YvesDenĂ©chĂšre, BĂ©atrice Scutaru)

-« Abortion and International Adoption in Post-Ceausescu Romania » – Gail Kligman-1992

-« Romania, for export only » – Roelie Post-2001

 Trafic d’enfants roumains-Reporters-1991-Ina

 

 

 

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